Quelle sanction encourt une décision prise par l’organe d’une société en méconnaissance des statuts ou de son règlement intérieur ? La nullité parfois, mais pas toujours.
En effet, la Cour de cassation vient de rappeler qu’une délibération ne modifiant pas les statuts d’une société ne peut être annulée que si elle a donné lieu à la violation d’une disposition légale impérative régissant les sociétés commerciales ou des lois qui régissent les contrats.

Précision : une règle impérative est une règle dont on ne peut pas écarter l’application, notamment par un contrat. En droit des sociétés, on ne peut ainsi pas prévoir dans les statuts une disposition qui dérogerait à la règle selon laquelle les engagements d’un associé ne peuvent être augmentés sans son accord.

Autrement dit, une délibération prise en violation d’une clause des statuts (ou du règlement intérieur) de la société qui n’est pas une disposition impérative n’encourt pas la nullité. En l’occurrence, les juges n’ont pas annulé les décisions de mise en réserve systématique des bénéfices et d’augmentation des rémunérations du gérant d’une SARL qui n’avaient été adoptées qu’à la majorité alors que les statuts prévoyaient une adoption à l’unanimité des co-associés.

En revanche, la Cour de cassation a retenu que la responsabilité du dirigeant, associé majoritaire, pouvait être mise en cause par l’associé minoritaire pour abus de majorité si celui-ci parvenait à prouver que la décision votée était contraire à l’intérêt de la société et avait été prise dans l’unique but de favoriser l’associé majoritaire à son détriment. Ce qui était le cas dans cette affaire. Les juges ayant estimé que la baisse des bénéfices de la société résultait de la décision du gérant d’augmenter sa rémunération de près du double en 4 ans (passant de 121 743 € en 2008 à 234 660 € en 2011 et à 222 056 € en 2012, soit une hausse de 100 % sur la période considérée). Le gérant associé a donc été condamné à verser une indemnité à l’associé minoritaire.

Remarque : outre le versement d’une indemnité aux associés minoritaires, l’abus de majorité peut conduire à la nullité des décisions incriminées.


Cassation commerciale, 20 février 2019, n° 17-12050

Les Echos Publishing 2019